Donner en gardant le contrôle

De nombreux facteurs conduisent à envisager la transmission de son patrimoine de plus en plus tôt : les prix de l’immobilier, la fiscalité, l’allongement de la durée des études…

Mais si transmettre tôt est avantageux sur le plan fiscal, une telle opération peut avoir des limites sur le plan civil :

Donner c’est se dessaisir. 

Alors que la durée de vie s’allonge, il est essentiel avant de donner, d’être attentif à la constitution de son patrimoine et des revenus qu’il sera susceptible de générer.
Pour autant, il est souvent possible de conserver la jouissance, c’est-à-dire l’usage ou les revenus du bien donné, notamment par la technique du démembrement, en se réservant l’usufruit.
Il est également possible de ne donner que l’usufruit, sur une durée déterminée au terme de laquelle le donateur recouvre la pleine propriété du bien. On parle alors de donation temporaire d’usufruit.

Donner à une personne mineure ou encore jeune, c’est aussi prendre le risque de voir les capitaux dilapidés ou mal gérés.

Des solutions existent pour prévenir une telle situation.
Attention « donner et retenir ne vaut » : il ne doit pas s’agir pour le donateur de se réapproprier le bien ; une donation doit comporter un appauvrissement et une intention libérale, faute de quoi elle risque de ne pas être valable ou de constituer, sur le plan fiscal, un abus de droit.
L’assurance vie est un très bon outil pour recueillir le fruit de la donation tout en permettant au donateur de « garder le contrôle ».

Nous vous en donnons quelques illustrations :

1.  Si le donataire est mineur

Il est possible de donner sous forme de don manuel (ou donation notariée) en y associant la souscription d’un contrat d’assurance vie. Les conditions du don sont rédigées dans un « pacte adjoint » qui peut prévoir que seul le donateur est habilité à faire des arbitrages ou des rachats jusqu’aux 25 ans du donataire, par exemple.
En pratique, ce pacte adjoint est signé par le donateur et les parents de l’enfant en tant que représentants légaux.

2.  Si le donataire est majeur

Pour que la clause d’inaliénabilité décrite ci-dessus soit valable, elle doit être limitée dans le temps et justifiée par un intérêt sérieux et légitime.
Ainsi, prévoir une telle clause au-delà de la fin des études – que la pratique établit à 27 ans – n’est pas recommandé.

Au-delà de 27 ans, il faut penser à d’autres solutions telles que :

Si le donateur a besoin de revenus :

Réaliser une donation en nue-propriété avec clause de remploi dans un contrat d’assurance vie.
Le contrat serait ainsi co-souscrit par le donataire en tant que nu-propriétaire et par le donateur en tant qu’usufruitier, dans le cadre d’une convention de démembrement qui organiserait les modalités de gestion du contrat et celle des rachats. Tous les rachats qui représenteraient davantage que le service de l’usufruit (rendement du contrat) seraient soumis à l’accord conjoint du nu-propriétaire et l’usufruitier.

Si le donataire a besoin de revenus :

Réaliser une donation en pleine propriété avec clause de remploi dans un contrat d’assurance vie.
Ainsi, le donataire est tenu de souscrire un contrat, dans le cadre duquel la clause bénéficiaire peut désigner le donateur comme bénéficiaire de premier rang.
Au terme du délai de renonciation (30 jours), le donateur peut accepter le bénéfice du contrat.
Si le formalisme prévu dans la loi du 17 décembre 2007 est respecté*, la Compagnie d’assurance requerra l’accord du bénéficiaire acceptant pour tout rachat ou avance.

Les solutions décrites ci-dessus associent l’assurance vie car, outre les effets de la capitalisation et la fiscalité favorable en cours de vie, cela permet d’optimiser la transmission pour deux générations.

Cependant, il existe bien d’autres possibilités telles que le démembrement, la société civile ou le commodat pour « garder le contrôle » et il conviendra d’identifier les objectifs de chacun ainsi que leur situation pour trouver le moyen le plus approprié.

* Article L132-9 du Code des assurances : « […] l’acceptation est faite par un avenant signé de l’entreprise d’assurance, du stipulant et du bénéficiaire. Elle peut également être faite par un acte authentique ou sous seing privé, signé du stipulant et du bénéficiaire, et n’a alors d’effet à l’égard de l’entreprise d’assurance que lorsqu’elle lui est notifiée par écrit. »

Ségolène ROQUES
Ingénieur Patrimonial

Cet article a été rédigé par les experts de ODDO BHF banque privée, pour en savoir plus, cliquez ici !

à lire aussi