Quarante ans d’engagement, deux associations créées, une vie consacrée aux autres : l’action humanitaire est inscrite dans l’ADN d’Annie Vallée. Œuvrant sur le terrain depuis 1979, elle fonde en 1991 Espoir sans frontières, une ONG1 dédiée aux « personnes vulnérables des terres oubliées ». Vingt-cinq ans plus tard, la branche culturelle prend son autonomie et devient Artistes en Action. Actuellement à la tête de cette nouvelle ONG, elle nous explique la nature de son action et fait le point sur les enjeux du monde associatif d’aujourd’hui.
Annie Vallée, comment vous décririez-vous ?
« Je suis une personne engagée dans l’âme. Toute petite déjà, j’avais de l’empathie pour les plus démunis, particulièrement pour les enfants que je fréquentais à l’école. Cette impulsion altruiste ne m’a jamais quittée et s’est rapidement concrétisée par une volonté d’agir sur le terrain. Après plusieurs initiatives en solo, j’ai créé ma première ONG pour donner un cadre juridique à mon action et trouver des financements. Sa croissance rapide a renforcé ma volonté de sécuriser en permanence son fonctionnement administratif et financier, tout en préservant sa philosophie d’intervention et son avenir. Mes meilleurs successeurs étant mes collaborateurs, nous avons régulièrement acté l’autonomie de secteurs, par la création d’associations indépendantes dédiées à un pays ou à un programme. En 2016, le programme culturel a ainsi pris le nom d’Artistes en Action, une ONG à part entière qui met le savoir-faire de ses quelques 250 artistes bénévoles au service de l’enfance oubliée partout dans le monde».
Vous avez choisi de vous engager auprès de la petite enfance. Pourquoi est-ce important ?
« Parce que c’est dans l’enfance que tout se joue, et plus particulièrement durant les 4 premières années de vie. Une enfance abîmée, c’est la porte ouverte à tous les maux sociaux. Notre philosophie consiste à travailler à la source des misères et des violences, pour éviter qu’elles ne se transforment et génèrent délinquance et terrorisme, en passant par les réseaux mafieux.
Les manifestations culturelles que nous organisons dans le cadre d’Artistes en Action visent à récolter des fonds pour la création de structures d’accueil dédiées aux enfants délaissés et maltraités. Véritables havres de paix, nos Maisons du câlin favorisent l’insertion sociale par l’éducation et la confiance restaurée.
Dernière ouverture en date : la maison de Coatepeque au Guatemala.
Pour agir sur le terrain, nous nous appuyons sur le tissu social local en recrutant du personnel déjà formé. Concrètement, nous voulons donner aux populations les moyens de sortir leurs propres enfants de la rue, de les mettre à l’abri et de les scolariser ».
Comment l’Orchestre philharmonique que vous avez créé contribue-t-il au succès de votre mission ?
« Cet Orchestre est le fleuron de notre association ! Composé de musiciens des 4 coins d’Europe, il est distingué du ‘Grand prix humanitaire de France’.
Cautionné par les Délégations diplomatiques, il se produit chaque année à l’UNESCO2. Idéal pour gagner en visibilité tout en réalisant de belles levées de fonds.
L’Orchestre permet aussi de promouvoir l’intégration sociale par la musique : inspirée par ses performances, notre Maison du câlin El Palmito au Salvador a créé son propre orchestre d’enfants ».
À quels enjeux le monde associatif fait-il face aujourd’hui ?
« Nous ressentons bien sûr l’impact négatif de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) sur le niveau des dons. Mais le principal défi selon moi reste la crise de confiance actuelle vis-à-vis du monde associatif.
Il est donc indispensable de repenser le système associatif en faisant appel, par exemple, au mécénat d’entreprise pour la gestion comptable et financière des structures. Restaurer la confiance passe aussi par une meilleure communication, plus ouverte et transparente, autour des besoins et des projets concrets des associations.
Pour ma part, je propose toujours à mes donateurs dirigeants d’entreprise de financer un projet bien précis, et les invite même à se rendre sur le terrain pour constater par eux-mêmes les progrès réalisés ».
Quelle est la clé du succès pour entreprendre dans le secteur associatif ?
« La clé réside dans la professionnalisation du secteur. Les structures associatives gagneraient à proposer à leurs bénévoles et salariés la formation continue pour leur permettre de monter en compétences mais aussi de rester au fait des tendances et de l’actualité. Côté gestion, une association humanitaire doit, comme toute entreprise, être soumise à des règles de contrôle strictes en matière de transparence et de responsabilisation ».
Comment la banque privée ODDO BHF vous accompagne-t-elle dans vos projets ?
« Je profite d’une mise en relation pertinente avec un réseau de donateurs potentiels, des clients dirigeants et particuliers dont le Groupe connait les vocations et les projets philanthropiques.
ODDO BHF m’aide aussi à préparer l’avenir : nous discutons actuellement de la création éventuelle d’un fonds de dotation au sein de la Fondation pour l’enfance en faveur d’Artistes en Action. L’objectif : assurer la pérennité de la structure après mon départ. Car entreprendre, c’est aussi préserver le futur de son organisation en préparant sa propre succession ».
1 Organisation non gouvernementale
2 Le prochain concert d’Artistes en Action aura lieu le 31 janvier 2020 à 20h, à la Maison de l’UNESCO (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization)