La chronique des marchés : Des paroles et des actes par Hugues de Montvalon – Oddo Banque Privée

Les opérateurs de marché, gérants de fond, analystes, courtiers, ont pris l’habitude d’écouter soigneusement le discours des banques centrales

•  Les déclarations de Janet Yellen, la présidente de la Fed, ou de Mario Draghi, le président de la BCE, sont disséquées avec une attention extrême ; l’intrusion ou la sortie d’une épithète dans les communiqués de la Fed suscite des débats d’experts.
•  C’est normal : la communication fait partie intégrante des outils à la disposition des banques centrales. On se souvient du fameux «whatever it takes » de Mario Draghi qui a changé la donne sur les marchés de taux de la zone. En annonçant durant l’été 2012 que la BCE ferait tout ce qui est en son pouvoir (« whatever it takes ») pour sauvegarder l’euro, le président de la BCE, par la magie du seul verbe, a stoppé net la course à l’abîme vers lequel roulaient les dettes publiques de la périphérie européenne.

Les récentes déclarations de la FED et de la BCE n’ont pas manqué de produire également leurs effets

L’annonce de l’extension du volume et de la qualité des actifs rachetés par la BCE dans le cadre de ses opérations d’assouplissement quantitatif (« Quantitative Easing », QE) a ainsi profité aux emprunts « Investment Grade » (IG, emprunts notés au-delà de BBB-).
•  Ces derniers ont vu leur différentiel de rendement par rapport à l’emprunt d’Etat baisser de 20 points de base, ce qui n’est pas mince pour cette catégorie d’actif.
•  Le rendement du secteur IG s’établit désormais autour de 1 %.

De même, le communiqué plutôt apaisant de la Fed sur l’évolution de la politique monétaire américaine a débouché sur un tassement des rendements américains, mais aussi sur un repli sensible du dollar, de 1,10 à 1,14 dollar par euro.

Il faut toutefois se méfier et ne pas trop sacraliser la parole des banquiers centraux

La zone Euro n’est plus dans la configuration de zone aigüe qui était la sienne quand Draghi a lancé son « whatever takes ».
•  A cette époque, les marchés du crédit ne fonctionnaient plus et la zone Euro était au bord de l’explosion.
•  L’intervention de Draghi avait rétabli la confiance et un équilibre coopératif.

Aujourd’hui, les marchés de crédit ont retrouvé un fonctionnement à peu près normal ; l’Italie et l’Espagne se financent sans trop de problèmes.
Si le crédit reste moribond, c’est d’abord parce que la demande n’est pas là et aussi parce que le régulateur, à force de contraintes et de règles,n’encourage pas vraiment les banques à prêter ! 

Tout cela pour dire que les belles déclarations de la BCE ne sont pas du tout une garantie de stabilité des rendements obligataires

L’année dernière, au lendemain de l’annonce des premières opérations de QE par la BCE, le rendement du bund allemand 10 ans était retombé en dessous de 0,10 %. Un mois après, il remontait à 1,0 % !
Cela, malgré la mise en œuvre effective des achats de titres par la BCE.
Dans la configuration actuelle des marchés de crédit européens, avec le niveau de taux bas que nous connaissons, le rendement marginal de l’action de la BCE est faible, voire nul disent certains. 

La FED communique régulièrement et très clairement ses objectifs

Depuis un peu plus d’un an, elle a même pris le soin de présenter visuellement ses prévisions de taux d’intérêt sous forme de graphiques, les fameux « dot-charts », les graphiques à points, où chaque point représente la prévision faite par un membre du FOMC (Federal Open Market Committee) pour une échéance donnée.

Depuis que ces « dot-charts » existent, la Fed n’a cessé de se tromper.
•  Elle n’a cessé de surestimer la hausse des taux à venir.
•  Autrement dit, la Fed s’est régulièrement fourvoyée sur le niveau d’activité de l’économie et/ou sur le niveau de l’inflation (plutôt cette dernière d’ailleurs).

Dans le contexte actuel, nous ne voyons donc pas la nécessité d’accorder un poids démesuré à ses déclarations, dans la mesure où elles sont en cohérence avec ce que nous percevons de l’environnement économique.C’est pourquoi nous préférons nous concentrer sur les publications des indices d’inflation ou d’activité que sur les déclarations de tel ou tel membre de la Fed.

En conlusion…

Nous avons assisté récemment à une baisse des rendements obligataires consécutive aux déclarations de la BCE et de la Fed. 
Il serait dangereux d’extrapoler la poursuite de cette baisse ou d’estimer que les marché des taux sont à l’abri d’une remontée brutale. In fine, ce sont les statistiques économiques qui auront le dernier mot.

Rédigé le 1er avril 2016.
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